Elsexit or not, faut-il se réabonner à ScienceDirect ? Sondage…
Avant la version définitive du protocole d’accord Couperin-Elsevier (finalement signé le 28 juin et porté à la connaissance de la communauté le 18 juillet 2019), nous avons sondé les chercheurs des laboratoires de l’Ecole des Ponts afin de savoir si ne pas se réabonner à ScienceDirect pouvait véritablement être une option…
Le sondage a eu lieu en ligne du 15 au 28 mai 2019 et ne comportait qu’une seule question “Pensez-vous que l’École des Ponts doive se réabonner à Elsevier ScienceDirect pour 2019-2022 ?” et offrait la possibilité de laisser le nom de son laboratoire et un commentaire libre. Nous avons eu 144 répondants dont 81 ont laissé un commentaire (soit 56%).
Nous partageons ici nos résultats et la méthodologie d’analyse, même s’il est évident qu’extrapoler à toute la communauté scientifique concernée par cet accord n’est pas envisageable.
Résultat nuancé selon les disciplines
A cette unique question, 52% des répondants se disent favorables au réabonnement. Dans la mesure où 143 des 144 répondants ont laissé le nom de leur labo, cela nous a permis de faire une distinction entre SHS et STEM et de repérer un résultat différent selon les disciplines : les SHS sont clairement favorables au réabonnement, les STEM légèrement défavorables.
Ce que révèlent les commentaires
Afin de profiter des commentaires laissés par les chercheurs, nous les avons classés manuellement dans 13 catégories (+ 1 pour les réponses sans commentaire). Un commentaire pouvant aborder plusieurs sujets, il n’est donc pas rare d’avoir taggé un commentaire dans plusieurs catégories.
Cette fois-ci, la distinction par discipline ne révèle pas de grandes différences à quelques exceptions près : les alternatives licites sont plus citées en STEM qu’en SHS, les coûts sont plus évoqués par les SHS et les opinions négatives d’Elsevier sont plus souvent exprimées en SHS.
Le graphique suivant permet de voir ce qui a guidé le répondant dans son vote.
Les répondants qui ont évoqué leurs besoins et l’usage de ScienceDirect ont voté massivement en faveur du réabonnement, ceci étant sans doute l’expression d’une inquiétude en cas de coupure. Les chercheurs concernés par les problèmes de coûts ont voté contre le réabonnement, tout comme ceux ayant signalé des alternatives qu’elles soient licites ou illicites.
Enfin, avec une analyse de co-occurences des types de commentaires (c’est-à-dire en examinant si le même répondant a évoqué plusieurs sujets), il est possible de générer le graphique suivant où chaque noeud est une catégorie et chaque lien la trace d’au moins une co-occurence, l’épaisseur du trait augmentant avec le nombre de co-occurences.
On identifie alors 2 clusters :
- L’expression des différents usages et la pertinence de la ressource par rapport aux besoins est logiquement très souvent exprimée. Elle est principalement reliée aux différentes alternatives possibles, à la voie verte (HAL ou Arxiv).
- L’expression de l’exploitation des chercheurs est fortement liée aux inquiétudes sur les coûts, et à l’opinion négative d’Elsevier.
On voit bien que l’expression de la nuance (“cependant”, “néanmoins”, “cela dit”) et l’expression du militantisme sont la charnière entre ces 2 clusters.
Ces résultats sont très nuancés et peuvent difficilement nourrir la décision de ne pas renouveler l’abonnement à ScienceDirect, qui a donc été repris pour 2019-2022. On voit que cette ressource est nécessaire aux chercheurs et que certains craignent de ne plus pouvoir y accéder et ce, même si les alternatives licites et illicites sont connues. Les documentalistes actifs que nous sommes sur le sujet de l’Open Access trouvent néanmoins du réconfort à voir spontanément cités la voie verte (et notamment HAL) et même le Plan S sur lequel nous avons communiqué dès son annonce, preuve que nous sommes entendus malgré tout.
Image en une : StacieBee on Foter.com / CC BY-NC-SA
Citer ce billet
Frédérique Bordignon (2019, 9 septembre). Elsexit or not, faut-il se réabonner à ScienceDirect ? Sondage… Carnet'IST. Consulté le 19 mars 2024, à l’adresse https://doi.org/10.58079/m8nk